Réf. Nécessaire #1 – Christophe Colomb
Leur langue semblait être un mélange d’Elfique et de Louchébem, mais je traduisais à mes hommes « Bienvenus à New Delhi ! Que toutes nos épices soient vôtres ! » Mes hommes jubilèrent ; leurs plateaux-repas étaient jusque-là fades et peu assaisonnés.
Clément AndreoliPour ce premier épisode, Clément Andreoli vous narre l’épopée de Christophe Colomb, navigateur génois de la fin du XVᵉ siècle.
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RÉF. NÉCESSAIRE ÉPISODE 1 – Christophe Colomb
Retranscription
* Prégénérique Riviera Ferraille *
* musique: Derek & Brandon Fiechter – Sir Galahad (Album Medieval Times) *
Bienve…
* musique *
Bienven… * excédé * oooh ! Un petit peu long comme intro… Bienvenus dans ce premier numéro de Réf Nécessaire. Je m’appelle Clément Andreoli, et ensemble nous allons parler d’Histoire. De l’Histoire avec un grand H, mais aussi des petites histoires, avec un petit h, celles qui ont fait l’Histoire… avec un grand H, euh…
Dans ce premier numéro nous allons parler de Christophe Colomb. Né à Gênes au quinzième siècle, Christophe Colomb était un navigateur pour le roi et la reine d’Espagne, Ferdinand d’Aragon et Isabelle de Castille. Comme de nombreux navigateurs avant lui, Christophe Colomb fut le premier à poser le pied en Amérique, ce qui fait de lui un personnage historique majeur de la fin du Moyen ge. J’ai eu la chance, grâce à une pièce d’identité et une carte de bibliothèque, de pouvoir consulter son journal de bord de la fameuse traversée de 1492. En voici quelques extraits, qui vont, je l’espère, vous faire voyager, au cœur de la marine marchande du quinzième siècle !
* bruits citadins anciens *
2 août 1492.
Veille du grand départ. Nous sommes prêts à rejoindre les Indes. Nos trois navires, la Pinta, la Niña, et Banque Populaire 3 —rebaptisée à la hâte Santa Maria pour toucher les financements de l’Église— sont prêts. La plupart des marins qui nous accompagneront dorment déjà à bord. Les frères Pinzón ne cachent pas leur impatience. Martín Alonso Pinzón est le capitaine de la Pinta. Vicente Yáñez Pinzón, celui de la Niña. Quant à moi, Christophe Colomb, dirigerai le navire principal. Mais laissez-moi avant tout me présenter…
* musique *
* chante * – J’suis Christophe Colomb, partons tous ensemble pour l’aventuuuure
Christopheu Colomb, tous en voituuuuuure
Nous partons pour les Indes en armure
Nous allons changer le futur
…
Christopheu Colomb, Christopheu Colomb, pour l’aventuuuuure
* la musique s’arrête *
Ce n’est pas mon premier voyage, encore moins en bateau. J’ai déjà navigué pour le Royaume d’Espagne, afin de rendre toutes sortes de services au couple royal. Caravelle, Catamaran, Optimiste, j’ai des diplômes pour tout, même s’ils sont un petit peu effacés parce que je les ai fait tomber dans l’eau. Entre nous, on pourrait s’attendre à ce qu’ils fassent des diplômes un tout petit peu plus résistants à l’humidité, mais bon… Nous partons vers les Indes, pour ramener toutes sortes de richesses à notre roi et notre reine. Ils veulent de l’or, des perles, et des épices.
Ah ! La route des épices ! Il me tarde déjà de revenir les cales chargées de piment, de cannelle, de safran, de cumin, de curry, de curcuma, de badiane, de cardamome, de clous de girofle, de gingembre, de garam, de sésame, de muscade, de paprika, de pavot, de ras el hanout, de moutarde, de sel, de poivre, de mélange cinq baies, de mélange volaille, de mélange provençal, de moulin poivre force 7, de Kubor, Ah ! L’or. L’or. L’or noir. L’or noir fringuant et robuste, l’or noir expresso, l’or noir robusto, l’or noir lungo, l’or noir compatible toutes machines, de Nespresso à Tassimo. Mais aussi de perles ! Ah les perles compatibles lavage à trente degrés, dissolvables en machine, bref, c’est toute une liste de courses que nous devons ramener. Je ne vais pas dormir de la nuit, parce que… ha ha, nous partons pour les Indes !
3 août 1492.
Jour J ! Nous embarquons les derniers vivres nous permettant de naviguer sereinement pendant plusieurs mois. Mes seconds font une dernière inspection du navire. Les check lists sont ok, la tour de contrôle du port de Palos de la Frontera nous autorise à hisser les voiles.
« Juaaaaaaaaan ! Hissez les AAAH ! Mais te mets pas comme ça derrière moi ! Putain mais je t’ai pas vu ! Bin oui mais après moi je gueule, là. Oh putain, en plus je me suis coupé avec mon épée. * se suce le doigt * Ah putain j’ai l’impression que la lame est hantée ou quoi là ? » hurlai-je à Juan qui était juste derrière moi. Juan transmit les ordres. Nous sommes partis.
* bruits de caravelle en mer *
6 août 1492.
Voilà trois jours que nous sommes en mer. Première mauvaise nouvelle : Juan m’a dit que nous n’avions déjà plus de thé. Il m’a dit texto « Nous sommes mal en thé. » Super l’expression. J’ai l’habitude de naviguer en haute mer vers les Indes. Et pourtant je ne reconnais pas la route. Le vent ne souffle pas dans le même sens, les vagues sont d’habitude un chouia moins hautes, et devrait déjà avoir passé un certain nombre de péages. J’ai refait tous mes calculs, j’comprends pas. La seule explication possible, c’est que nous soyons partis dans le mauvais sens. Quand même… Euh… Ah nooon ! Merde. Oh merde ! Merde, merde, merde, merde, merde, merde. Oooh putain on est parti dans le mauvais sens. Aïe-aïe-aïe. Je vais avoir l’air tellement con quand je vais leur dire ! Oooohlala, la honte ! On est parti dans le mauvais sens ! Aïa-aïe-aïe-aïe-aïe ! Et encore j’ai de la chance, personne s’en est rendu compte. * silence * Bon, je vais rien dire. Avec un tout petit peu de bol, c’est une autre route qui mène vers les Indes. Allez, on va compter là-dessus. Putain le con !
* bruits de caravelle en mer *
7 août 1492.
Bin j’ose rien leur dire. * rire gêné * Le moral est bon, je vais pas tout gâcher avec des détails comme « Hééé, ça fait une semaine qu’on est parti dans le mauvais sens ! » Tant que personne s’en rend compte, ça ira. Par contre, j’ai très peur de ce que les frères Pinzón doivent penser. Les capitaines des deux caravelles qui nous suivent se sont forcément rendu compte de mon erreur. Mais ils me suivent toujours ? Bon. Par fidélité j’espère. Je vais pas me lamenter !
* bruits de caravelle en mer *
8 août 1492.
J’ai vu des sirènes ! Trois sirènes, elles sont sorties bien haut de l’eau, mais elles étaient pas aussi belles qu’on les dépeint. D’une certaine manière, leur visage avait une forme masculine. Ça reste quand même TRÈS tentant. Mais j’ai résisté, contrairement à certains de mes hommes qui ont sauté par-dessus bord pour les rejoindre. Mais une fois arrivés, ils se sont rendu compte que ce n’étaient que des lamantins. Ils ont quitté leur poste pour des lamantins ! Lamentable ! J’ai dû faire un discours pour les recadrer. « Vous êtes lamentables ! Des lamantins ? Vous croyez que ce voyage est pas assez compliqué ? Entre ma lame hantée, on est mal en thé, des lamentables lamantins, vous m’abandonnez en beauté, vous êtes mal en bateau ou mal embouchés ? Oh ! Attendez, je crois que j’ai un truc. * beat * Euh… Yo ! Yo ! Yo ! Yo ! Yo ! Lamentables lamantins ma lame hantée mal en thé ma lante… Ooh ! J’arriverai pas à le refaire. Ha. » La Pinta s’est approchée très près de notre navire. Dès que je suis monté sur le pont, Martin, le capitaine de la Pinta, m’a fait de grands, grands signes. Je suis sûr qu’il sait que nous allons dans le mauvais sens. Putain, je dois vraiment passer pour un gland, j’ai besoin de ça, avec tout le reste… Plutôt que de me payer la honte, j’ai décidé d’ignorer ses signes. Je vais faire comme si j’avais rien vu, on va garder notre cap, de toute façon il est trop tard pour faire demi-tour maintenant, hein !
* bruits de caravelle en mer *
12 août 1492.
Quand je pense qu’on est parti dans le mauvais sens… Je veux pas me chercher d’excuses hein, mais je suis le seul à m’en être rendu compte en même temps, donc euh… Après, je pense qu’ils savent, mais qu’ils osent pas me le dire. Je les ai pris un par un, je leur ai demandé s’ils avaient quelque chose à me dire, là, juste entre nous. Et personne ne sait qu’on est parti dans le mauvais sens. Mais apparemment la plupart d’entre eux pense que j’essaie de savoir si Juan veut sortir avec moi. Boh, eh, j’aime bien Juan, hein ! Mais j’ai une femme, lui aussi, et puis euh, c’est pas parce que… on rigole bien, tous les deux, et euh, qu’il est beau euh, beau comme un dieu grec… han ! que je voudrais… j’veux dire ça va quoi ! Ha !
Les gars s’ennuient ! Et je les comprends, hein ! Y a qu’un film à bord, c’est Le Royaume de Ga’hoole, et quand on a vu des chouettes parler une fois, on a un petit peu fait le tour du concept, hein ! Je dois les occuper, pour que personne se rende compte de mon erreur. Un équipage occupé, c’est un équipage qui s’occupe pas de là où nous allons. Les Indes pour eux, et moi j’sais pas où on va. Pas la moindre idée. Martín, le capitaine de la Pinta, s’est encore approché de nous aujourd’hui. Il m’a fait de grands, grands signes quand il m’a vu sur le pont. Oh, le malaise !
* bruits de caravelle en mer *
8 septembre 1492.
Nous avons monté un atelier choral. Les gars sont contents, on est en pleine mer et on peut gueuler, et y a personne pour juger. La voix cristalline de Juan, mon second, me surprend chaque fois un peu plus. Tout le monde est investi, et si on travaille assez dur… on a nos chances aux régionales.
CHORALE * chantant une version de 1492 Conquest of Paradise en français * – Ils sont partis pour l’imaginaire
COLOMB – Ensemble !
CHORALE – Au sombre chant de la nuit
COLOMB – Vous êtes en retard…
CHORALE – Aux battements des…
COLOMB – Trois, quatre… Un, deux… Vous êtes en retard !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – Diii.. Allez ! Oooh !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – M ! M-m-m-m-m-m. Non ! N’importe quoi !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – Pffff !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – Trois, quatre ! Un, d-oh !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – C’est faux !
* La CHORALE continue son chant *
COLOMB – Non moi c’est Christophe, pas Cristóbal, donc euh…
* La CHORALE s’arrête brusquement *
* bruits de caravelle en mer *
14 septembre 1492.
Ma femme me manque. Je regardais le coucher de soleil, tout à l’heure et euh… J’avais envie de… partager ça avec elle. C’est vrai que… même si j’ai amené ma guitare, ce qui me permet d’un petit peu me… m’exprimer émotionnellement euh… ce coucher de soleil m’a fait beaucoup de bien, et du coup, bin j’ai sorti la guitare et euh, j’ai joué ce morceau :
* musique (instrumentale – guitare électrique) : Parisienne Walkways – Gary Moore *
29 septembre 1492.
Martín a encore approché la Pinta très, très près de mon navire et il m’a encore fait de grands, grands signes. Est-ce que c’est pour me dire que nous n’allons pas dans le bon sens ? A-t-il des informations sur notre direction ? Est-ce qu’il sait que nous sommes partis dans le mauvais sens ? J’suis obligé de prendre le risque de l’ignorer. L’important c’est que tout le monde sache que je sais ce que je fais. En plus aujourd’hui on a perdu un homme euh… un des jumeaux, Pince-Mi et Pince-Moi. Pince-Mi est tombé à l’eau, et malgré le chagrin ça m’a fait penser à une blague. C’est un Belge, un Français et un Espagnol qui rentrent dans une pizzeria… * rire *
* bruits de caravelle en mer *
3 octobre 1492.
Qu’est-ce qu’on s’ennuie ! * soupir * Je suis au fond du trou, j’sais même plus quoi leur dire… * fredonne sur l’air de la chanson du début * Je suis Christophe Colomb, tous ensemble allons droit dans le mur… Les Indes sont à des années-lumière, nous allons tous mourir en mer…
Aaah ! L’ambiance de merde !
11 octobre 1492.
Le moral est au plus bas. Une épidémie de dysenterie touche l’équipage. Tout le monde est au plus mal * long pet * Dieu merci, je suis encore indemne et barricadé dans la cabine. * pet coulant * J’ai peur que tout soit de ma faute. Je mène mes hommes vers l’inconnu et… * pet * ils savent rien, parce qu’ils chantent, ils dansent, ils dessinent, ils votent des règles, ils participent à l’élaboration des menus… Ils sont impliqués dans ce voyage ! Mais euh… la maladie les ronge, * pet * probablement à cause des rats. * petit pet * Juan dit que les rats n’ont pas de maladies, qu’on a rien à craindre. * pet * Il a tenté de me le prouver en en embrassant un mais… Juan est aujourd’hui le plus touché. * long pet coulant * J’espère que nous trouverons des terres pour nous reposer et enterrer nos futurs morts parce que… * en riant * à la vitesse où certains se vident* pet *, je nous vois pas tenir une semaine * petit pet * de plus…
* bruits de caravelle en mer *
12 octobre 1492.
La folie nous a gagnés, ce voyage interminable nous est monté à la tête. La maladie, la faim, la soif, le Royaume de Ga-hoole, nous craquons les uns après les autres. Je pense à ma femme, à mon fils, à mon domaine, à quand reverrai-je la terre ferme. J’ai déçu la reine, le roi, et si je m’en sors vivant je serai tué. Où sont les épices ? Où sont les mélanges cinq baies, les Kubor, ils sont en moi, dans mon échec, dans ma folie, * rit comme un maniaque * HA HA HA ! Et je mènerai ce navire jusqu’à sa perte ! * en faisant de l’écume avec sa bouche * Et je m’en fous, je m’en fous ! Qu’on crève, et qu’on recommence ! Une fois ! Deux fois ! Cent fois ! Mille fois ! Qu’on se perde à chaque fois parce que c’est notre DES-TIN ! Et qu’on CRÈVE ! Et qu’on se VIDE, comme Juan s’est VIDÉ, et qu’on roule des PELLES à des RATS ! Et que la Pinta et la Niña coulent comme des PIEEEE-HEE-HEEERRES ! Et qu’on tombe dans l’infini parce qu’on arrive au bout de la Terre PLATE ! Et j’emMERDE les Indes et leurs épices à la CON ! Les épices ça va cinq minutes j’aime pas manger épicé personne aime ça, on veut juste faire les mecs ouverts avec les cuisines du MONDE ! RAAH !
MARIN – TERRE ! TEEEERRE !
COLOMB – Quoi ? Terre ?
MARIN – TERRE EN VUUUUE !
COLOMB – Terre en vue ? On approche ?
MARIN – BIN OUI MAIS ÇA SERT À QUOI QU’JE GUEULE ALORS ?
COLOMB – Mais ça va ! Je demande…
MARIN – MAIS OUI MAIS J’VEUX DIRE J’AI QU’CA À FOUTRE…
COLOMB – OUI BIN CA VA ! ON VA PAS S’ENGUEULER MAINTENANT !
MARIN – ZUT !
COLOMB – TOUS À SON POSTE !
* musique *
13 octobre 1492.
Nous avons accosté ce qui semble être une île. Les gars crient « INDE ! INDE ! NAMASTÉ ! » mais je suis le seul à savoir que nous avons découvert un territoire complètement inconnu. Dès mon arrivée sur la plage, le capitaine Vicente, de la Pinta, vient vers moi. Il est en colère. J’ai ignoré ses signes pendant toute notre traversée et il le sait.
VICENTE – « Eh bin alors ? On vous a fait coucou pendant tout le trajet, vous nous avez pas vus ? »
COLOMB – Après plusieurs heures sur la plage à creuser des trous et à construire des châteaux, un peuple est venu à notre rencontre. J’étais très embêté parce qu’ils n’avaient absolument RIEN d’indien. Juan s’est approché de moi et m’a dit « Vous êtes sûr qu’ils sont indiens ? », et j’ai dû improviser. « Évidemment qu’ils sont indiens ! T’es déjà allé en Inde ? Non ? Alors qu’est-ce que t’en sais ? Faut arrêter avec les clichés, les gars ! Si vous en avez jamais rencontré, vous pouvez pas savoir hein ! » Je fais un signe discret à celui qui sembla être leur chef. « Psst ! Hey ! Joue le jeu ! Vous êtes indiens ! Joue le jeu ! » Il ne semblait pas me comprendre. Il prononça quelques mots dans la langue locale en levant les bras et en brandissant sa lance. Je fis semblant de le comprendre. Leur langue semblait être un mélange d’Elfique et de Louchébem, mais je traduisais à mes hommes « Bienvenus à New Delhi ! Que toutes nos épices soient vôtres ! » Mes hommes jubilèrent ; leurs plateaux-repas étaient jusque-là fades et peu assaisonnés.
* la musique continue *
25 octobre 1492.
L’atmosphère est pour l’instant TRÈS BONNE ! Nous échangeons nos expériences avec curiosité. Les autochtones apprécient le Royaume de Ga’hoole et le regardent sans cesse, tandis qu’un de mes hommes, Frederico López, vit avec leur tribu. J’essaie furtivement de les intéresser à un échange commercial. Je dois ramener de l’or, des perles et des épices pour satisfaire le roi et la reine. Je ne sais pas s’ils en possèdent. Ils sont secrets, espiègles, voire mutins. Je leur propose d’abord d’échanger Juan contre ce qu’ils ont de plus cher, ce qu’ils semblent comprendre comme « nous sommes friands de randonnée ». Après huit jours de randonnée, Juan revint avec la certitude qu’ils possédaient d’énormes ressources. Frederico López, qui avait appris quelques rudiments de leur langue, réussit à créer un dialogue. Très vite je compris qu’ils n’avaient aucune notion de la valeur des choses, ce qui facilita les négociations. Nous échangions des babioles contre de l’or, du tissu contre des perles, des pog contre des kinis, des cartes potion contre des Pokémons dorés, des chèques-cadeau contre de l’argent liquide, des kinis contre des doubles kinis, et ils en étaient RA-VIS ! Mon voyage n’était pas un désastre ! Certes, je n’étais pas arrivé en Inde, mais j’avais découvert un nouveau monde. J’étais le seul à en avoir conscience, mais mes hommes étaient persuadés d’être arrivés dans les Indes. Je n’avais qu’une seule crainte, c’est que les peuples de ces continents expliquent qu’ils n’étaient pas indiens. Si j’ai un peu de chance, je serai mort et enterré avant que quelqu’un ne comprenne qu’ils s’appellent autrement qu’Indiens. Imaginez que plusieurs siècles après on les appelle encore Indiens, ce serait quand même un putain de coup de chatte…
* la musique continue *
16 octobre 1493.
Alors déjà bonne année ! Euh… Bonne santé… Euh, surtout la santé, c’est le plus important, la santé. Après de longues tergiversations et un teubé qui a involontairement coulé Banque Pop—enfin, la Santa Maria—, j’ai décidé de retourner en Europe, pour à la fois présenter nos découvertes, et chercher des hommes, et du matériel, afin de renforcer notre présence là-bas. Tant qu’il y aura des peuples assez stupides pour échanger —excusez-moi hein !— mais la carte de base de n’importe quel paquet de Pokémon contre un Tortank doré, on sera là, le deck dans la poche. Et j’aimerais aussi revoir ma femme, parce que les meufs sur place, sympas et tout hein, c’est pas le problème… Mais si c’est pour entendre parler de régime paléo toute la journée euh… Merci !
* musique : Vangelis – Conquest of Paradise *
4 mars 1493.
Martín a essayé de me la faire à l’envers, et d’arriver à Lisbonne avant moi. Arriver le premier d’une expédition comme celle-là pour se la péter, alors que j’ai fait TOOUUUUT le taf moi-même. J’veux dire, qui c’est qui a eu l’idée de se planter en premier ? Hein ? Bon. J’trouve ça un peu gros, quand même ! J’ai été reçu par le couple royal, Aragon et Castille, a.k.a. Citron et Vanille, et je leur ai présenté nos découvertes. Ooh, bien sûr, ce ne sont pas les Indes, mais quand même ! j’y retournerai très vite pour assurer la domination du Royaume d’Espagne sur ce nouveau monde. Et je sais paas, j’suis sûr que les mecs de là-bas on peut les faire bosser pour pas grand-chose. Ils sont tellement sympas !
* musique : Simple Minds – Don’t you *
Plusieurs années après, Juan devint l’Amiral du porte-avions Charles de Gaulle. Les frères Pinzón ont ouvert une série de magasins, franchisés Gifi, dans la région PACA. Quezo Potec, le chef des Indiens, est ingénieur en vêtements techniques chez Décathlon. Pince-Mi s’est installé avec l’un des lamantins rencontrés lors de la traversée. Christophe Colomb, quant à lui, est mort dans la misère la plus totale, ignoré des siens, au milieu de l’océan Pacifique, en tentant de relier Lisbonne à Biarritz.
KLEM – Merci d’avoir écouté ce premier numéro de Réf Nécessaire ! Réf Nécessaire est disponible sur Soundcloud, iTunes, et sur une sélection de vols HOP entre Paris et la province. La plupart des musiques sont des frères Derek et Brandon Fiechter, que vous pouvez retrouver sur YouTube et Spotify. Merci à Wikipédia et à Henry Michel. Réf Nécessaire est un podcast Riviera Ferraille. Je m’appelle Clément Andreoli, et à bientôt, pour le prochain épisode !
* musique de bande-annonce *
Dans le prochain épisode de Référence Nécessaire… Gengis Khan !